La Linafoot a lancé, pour la saison 2021-22, sur le marché un nouveau système de paiement pour l’accès au stade pour les fans. Kanda, carte variant entre 15 et 50 USD, devrait permettre de revoir le modèle économique des clubs pour les aider à éviter les fuites d’argent. FootRDC s’est entretenu avec l’initiateur du projet Kanda Bob Makandalele. Du haut de ses 40 ans, manager de Grow Africa et Max World, agence de marketing du sport, il nous a parlé de cette innovation et de ce qu’elle apporterait au football congolais au cours d’une rencontre à Lubumbashi.
FootRDC : Comment s’est passé l’accueil de la carte Kanda ?
Bob Makandalele : Lupopo, avant le match face à Lubumbashi Sport, avait pris plus de 4.000 cartes, Mazembe, à travers les membres de sa coordination à solliciter également les cartes, le président de Lubumbashi Sport a passé sa commande et ça se passe bien. C’est vrai que je ne peux pas donner des chiffres exacts pour le moment mais je félicite et remercie les sportifs du Haut-Katanga pour leur ouverture. Je suis surpris par leur esprit ouvert à l’innovation et cela prouve que cette opération sera une réussite. Quand la carte Kanda va faire ses preuves au Haut-Katanga, d’autres villes suivront le modèle.
Parlons de chiffres, jusqu’à combien de cartes vont être mis sur le marché ?
BM : Quand nous avons lancé le projet Kanda, 100.000avaient été imprimés à titre expérimental en 2019. Le contrat avait été signé à la FECOFA par le président Constant Omari et les représentants des clubs du pays. La pandémie de la covid-19 ne nous a pas permis de rendre effective la mise en marche de Kanda. Maintenant que le gouvernement permet que 50% de supporters retrouvent les installations sportives, nous lançons le projet. Ces 100.000 cartes sont reparties pour toutes les provinces et le Haut-Katanga en compte 30.000 cartes. D’après les estimations, après deux jours, nous étions à plus de 8.000 cartes mis en ventes. Nous nous attendons à ce que d’autres cartes soient prises d’ici les grandes affiches de la saison.
Comment est né le projet Kanda
BM : J’aime l’adage qui dit que nous devons être le changement que nous désirons. On oublie que le football est un business aujourd’hui. Ailleurs, d’après mes observations, tous les clubs ont une organisation solide où la billetterie constitue la deuxième source de revenus après les droites télés. Les clubs vivent de cet argent et leur permet de planifier leur projet sur base de ces entrées. Nous avons donc réfléchi à une idée qui permettait aux clubs et à la ligue de lancer ce projet, vu qu’à part Mazembe, aucun club congolais n’a son stade privé. Ensuite, nous avons pensé au pouvoir d’achat du congolais pour qu’il puisse se procurer une carte qui lui permettra de suivre les matchs de toutes les équipes et à un prix raisonnable pour résoudre la problématique des stades vides. En 2019, on a donc proposé le projet à la Linafoot. Cependant, sans vouloir tirer sur qui que ce soit, ce projet a connu et connaît encore des attaques.
Qu’est-ce qu’on craint avec le projet Kanda pour le combattre ?
BM : Kanda vient casser le circuit de billets parallèles parce que l’argent ne circule plus dans les stades, les supporters payent en amont et on vient seulement avec sa carte. En Linafoot, malgré que les stades soient souvent pleins, les recettes ne correspondent pas au prorata de personnes présentes dans le stade. Dans d’autres cas, les matchs sont déclarés déficitaires et l’Etat, les clubs, la ligue et tous les acteurs du football sont perdants. Personne n’a jamais proposé une solution car ça profite à un groupe de personne. Ces individus nous prennent pour une menace au lieu de voir la carte Kanda comme une opportunité à rentabiliser.
Où sont ces gens-là ? à la Linafoot ? à la FECOFA ? ou dans les clubs ?
BM : Le milieu du football est corrompu, pas pour tout le monde mais il y a des gens qui, pour leurs intérêts, n’acceptent jamais que l’avantage du football congolais soit mis en avant. On accuse Bob Makandalele de vouloir devenir riche au lieu de voir l’apport que cette idée offre aux clubs. Avec Kanda, les forfaits et les revenus sont respectés : la DGRAD, le stade, la ligue, rien ne change. Nous pensons seulement que les matchs doivent être catégorisés, un Mazembe-Lupopo par exemple c’est un match de catégorie A, et il a son coup. Les clubs peuvent faire des projections parce qu’ils savent à l’avance ce que la Ligue leur doit à chaque match. Je ne viens pas sauver le football mais c’est une synergie de tous pour le bien du football congolais.
Qu’est-ce que Kanda va changer dans l’économie du football congolais aujourd’hui ?
BM : Un club sait les matchs qu’il joue et les revenus attendus. Le club peut prendre un prêt bancaire sur base de ses estimations et tout sera clair car c’est défini, c’est un vrai plus économique. On va arrêter de crier au matchs déficitaire. Le football actuel demande que toute l’intelligentsia s’y mette pour développer le football autant que les autres domaines.
Comment les fans sont impliqués dans le processus ?
BM : Pour que les fans s’approprient Kanda, nous avons choisi de travailler avec les coordinations de clubs, ils sont les revendeurs. Cela veut dire que le prix dernier client de la carte c’est 15 USD, à la coordination, on donne un prix de gros qui permet au club d’avoir une marge de bénéfice. Le supporter, en payant la carte, contribue directement aux recettes de son équipe. Chaque club a un pourcentage dans les achats de cartes Kanda, ce qui peut soulager la caisse de l’équipe.
D’un autre côté, le supporter son privilégié. Quand il paye un minimum de 3.000 fc par match fois 19, il sera à plus de 20 USD (57.000 en total), mais avec Kanda il peut que 15 USD et suivre et les matchs de son équipe, et les matchs d’autres équipes même dans d’autres villes. Kanda ne résoudra pas tous les maux du football congolais mais si n s’y met tous, ça peut changer beaucoup de choses, vivre le football autrement. Si tout le monde se met sur ce projet, il réussira et toute l’Afrique va nous regarder et suivre ce modèle que nous mettons en place.
A propos de la sécurité de la carte Kanda, on craint qu’elle ne soit pas suffisamment cryptée ou facilement piratée
BM : Dupliquer cette carte couterait plus de 10 USD, nous savons que certaines personnes vont tenter de la pirater. Au départ, le contrôle sera manuel car on tient à l’introduction de la carte Kanda sur le marché. La carte, qui a un QR Code a un système sophistique que tous les contrôleurs connaissent. Après la dixième journée, nous établirons d’autres mesures. En parallèle, nous acceptons la marge de fraude parce que c’est le prix à payer pour que le produit soit consommé au départ. Le code sera utilisé après la 10e journée et tous les fraudeurs seront pris sur le champ par des agents de l’ordre.
Il y a deux ans vous aviez lancé Tombola Ndembo mais il n’a pas marché. Quelle différence aujourd’hui entre ce projet-là et Kanda ?
BM : Dans mon parcours, je reste cohérent et l’idée mère c’est d’aider le football congolais. J’ai connu des échecs dans d’autres projets mais je ne m’attarde pas sur là où j’ai échoué. J’apprends de ces échecs et reste constant dans mon désir d’aider. Les critiques créent une balance et me permettent de rester motivé. On ne peut pas créer de l’unanimité tous les jours. Nous sommes jeunes et nous ne devons pas nous sous-estimer.
Et puis, il y a aussi le projet Grow Africa, était-ce un feu de paille ?
BM : Nous avons effectué une activité avec le Real Madrid. Au départ, les gens n’y croyaient pas, ensuite le Real est venu. Le projet c’était de jauger pour voir le potentiel congolais. J’ai parlé du Congo au Real Madrid et à la Liga pour que l’on croie en ce que les sportifs congolais sont capables de faire. Madrid est venu parce qu’on collaborait déjà avec Leganes. La première dame Denise Nyakeru s’est jointe au projet pour sa réussite. Grow Africa a envoyé une correspondance à la fondation mère pour que les jeunes sélectionnés par le Real continuent leur formation après.
Interview réalisée par Iragi Elisha
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